Issue 21

La vie clandestine des constructions qui cessent d’être des constructions a toujours suscité un intérêt d’exploration et un questionnement sur l’oubli. Le fait d’imaginer de nouvelles constructions par l’exercice de ma profession accentuait ce sentiment de lâcheté face ces ouvrages souvent remarquables et débordants de vécu, qui transpirent au travers de ses matériaux dégradés. Fixer ces espaces comme une forme d’archéologie topologique, raviver leurs propriétés pour soutenir leurs combats qui sont ceux de la survie sur la décomposition, sur le temps, sur le silence.

La plupart des espaces photographiés que je présente ont disparus. Certains ont été épargnés et ont été réhabilités par un changement de leur fonction initiale. Dans tous les cas, leur histoire a été effacée, pour se disperser jusqu’à l’oubli.

La destruction est toujours contestable, doit être contestable, car elle ferme définitivement les horizons des politiques urbaines. Socialement, car elle affecte irrémédiablement le vécu des personnes qui de près ou de loin se sont appropriées ces lieux, par le travail ou par une activité quotidienne. Environnementalement, car la pratique du quartier perd ses repères visuels, ses rythmes et c’est l’ensemble des sens jadis perçus qui s’effacent définitivement.
Cette série Issue21 propose à partir d’une superposition de photos avec un temps d’exposition différent ou un filtre, une forme de décalage de notre perception du réel par une mise en scène fictive de la lumière sur ces espaces ordinaires, ces lieux abandonnés en attente d’effacement. Je m’appuie sur la géographie de ces espaces pour isoler une zone, un objet, une trace identifiée qui peut représenter le temps écoulé, distillé et la mémoire encore présente ressentie pour la mettre en perspective.

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